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Article paru dans le numéro du 7 décembre 2001


CINEMA


Fanta ou comment l’amour aide dans la galère

Ce n'est plus le fait d'être blanc ou noir qui est interrogé,
c'est le couple comme élément constitutif de la socialité



Les premières images d’un créateur traduisent toujours les circonstances dans lesquelles il fabrique son film. Celui de Joséphine Bertrand Tchakoua ne semble pas échapper à cette règle: un synopsis “intègre” et générique : le couple. Des images parfois tendres et hésitantes. Une critique féroce de la presse camerounaise.

Suzanne KAPA-LOBE


La galère ou la crise plus globalement font-ils exploser un couple? Ou qui de l’amour ou de la crise délite plus les relations humaines ? Qu’est-ce qui fait que deux êtres s’aiment, tissent des rapports amoureux et que cette qualité humaine de la relation à l’autre, survive par delà les conditions objectives dans lesquelles cet amour se déroule?
Ce sont lâ les questions du film de la jeune cinéaste camerounaise Joséphine Bertrand-Tchakoua. Qui a fait ses classes au cours Florent, qui a
pris le temps d’apprendre les techniques de la cinématographie et qui bien sûr, comme toutes les élèves, tente dans son premier film de cumuler tous les éléments de son apprentissage. Elle se détachera cependant un peu, en proposant à nouveau ces questions sur les amours mixtes. Ces couples dominos.


Mais regard nouveau, ce n’est plus la mixité qui est un problème. Mais le couple qui est mis en examen, dans sa complexité, sa dualité, sa capacité d’exclusion ou de fusion.
Ce n’est plus le fait d’être blanc ou noir qui est interrogé, c’est le couple comme élément constitutif de la socialité... Ainsi, des questions quasi ordinaires et séculaires, reviennent sous la caméra d’une jeune femme de caractère qui se lance à la conquête d’un univers complexe.
Elle le fait avec des interrogations sur une certaine relation de causalité qui a toujours été établie entre la “crise” et la solidité des liens dans un couple. Qui sera vainqueur de l’amour ou du chômage, sur le couple? Questions lancinantes, récurrentes. et questions quI pourraient à nouveau relancer le débat sur une des fonctions heuristiques du cinéma : l’art d’accoucher les esprits en les divertissant ou la technique du divertissement comme absolu esthétique. Le film de Joséphine Bertrand-Tchakoua résume ces interrogations avec une certaine justesse.


Entre l’amour et la crise : il y a match?
L’histoire pourrait commencer ainsi avec cette phrase en exergue et continuer par :
Un couple dans un quelconque pays d’Europe. Ou dans n’importe quel autre pays, où la mixité et le métissage ne sont pas les tendances dominantes. Une noire et un blanc s’aiment.. Et vivent dans la galère. Quoi de plus normal alors que ce fait divers là, cette quotidienneté des gens, ne soit l’épicentre d’une réalisation, la première, d’une jeune cinéaste qui regarde la société humaine à travers le prisme des deux monde qu’elle affronte ? L’Afrique et l’Europe.


Fanta est le tout premier long métrage de Joséphine Bertrand Tchakoua Un film qui sort en avant-première au Cameroun et depuis le 24 novembre. Si le synopsis du film indique une thématique articulée entre la construction d’un scénario et le caractère des personnages, Joséphine Bertrand Tchakoua affirme avoir utilisé les techniques de construction des conclusions àl’américaine..
Son film est lisible, et conduit à une conclusion fermée... Que devient le couple après ces expériences èchelonnées de la vie? Contestée pour la “mauvaise” qualité technique de son Ïuvre, critiquée parce qu’omniprésente dans son film. Joséphine Bertrand Tchakoua continue courageuse son travail.. Celui d’une jeune cinéaste qui fait ses premiers pas dans un univers où la cinématographie africaine n’a pas fondamentalement changé. Entrée dans les logiques universalistes et normatives de l’industrie mondiale du cinéma. le regard sur les nouvelles cinématographies reste conditionné par la culture du
zapping et des séries américaines.
Du coup lorsqu’un film sort, les défauts de la technique deviennent les fondements essentiels d’une critique esthétique qui souffre d’une immense approximation. Mais il est vrai que le métier d’artiste et la création sont des domaines exposés. Ici, comme ailleurs, le jugement critique du journaliste apparaît comme le fondement même de l’oeuvre. Alors chacun y va de son
savantissime, de son coup de griffe, expliquant comment et pourquoi Joséphine Bertrand Tchakoua aurait dû faire un autre film... Le public pourra juger sur pièce. à Douala. Comme il a l’a accueilli avec sympathie àYaoundé. Le film sort le 8 décembre au Cinéma le Bonapriso.

 

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